2-DIL : repenser les soins
2-DIL, c'est le nom donné au projet des Cliniques universitaires Saint-Luc qui vise à repenser le rôle de chacun dans les équipes soignantes. Initiée en 2023, cette réorganisation permet de répondre à plusieurs défis : la pénurie infirmière, l'expertise plus importante suite à la création d'une 4e année dans le cursus infirmier, l'augmentation de la complexité des prises en charge...
Le personnel infirmer est en pénurie. Ce n’est pas un scoop. Résultat : une charge de travail accrue, un sentiment d’insatisfaction au travail et, parfois, l’envie de quitter cette belle profession. « Saint-Luc, comme toutes les institutions de soins, est confronté à cette problématique, explique Joëlle Durbecq, Directrice du Département infirmier. Face à cette problématique, nous avons choisi de mettre en place une solution innovante. Nous avons décidé de DILer. En toute légalité bien sûr puisque l’on parle ici de notre projet 2-DIL (pour « two » et « to deal ») qui consiste à réorganiser le travail dans les unités de soins. »
Repenser le rôle infirmier
Le principe de 2-DIL c’est de permettre aux infirmiers et aux infirmières de déléguer certaines de leurs tâches aux aides-soignants, qui se voient ainsi confier de nouvelles responsabilités et plus d’autonomie. De leur côté, les infirmiers et les infirmières peuvent se recentrer sur les soins infirmiers et passer plus de temps au chevet de leurs patients.
« Repenser la manière de travailler renforce également l’expertise de chaque métier, poursuit Julien Van Den Veyver, infirmier-chef. Car pour que 2-DIL fonctionne, les aides-soignants et aides-soignantes ont suivi 150 heures de formation. Forts de ce nouveau bagage, ils sont compétents pour réaliser des actes de soins supplémentaires (prise des paramètres et des glycémies, injection sous-cutanée d’héparine et administration des médicaments, encodage des paramètres en temps réels et gestion des dossiers...). Ils participent également au rapport, c’est-à-dire le passage en revue de tous les dossiers des patients lors du changement d’équipe. »
Une nouvelle dynamique
2-DIL ne concerne pas que le personnel infirmier et les aides-soignants, cette nouvelle dynamique impacte tous les métiers de l’unité de soins et donne un nouveau souffle dans l’organisation du service. Le climat de travail est plus serein et l’énergie est mieux dépensée. Cinq unités de soins fonctionnent déjà sur ce modèle et les retours sont positifs, tant du côté des soignants que des patients. Douze autres unités seront 2-DIL d’ici la fin de l’année.
Patrick Féfé Matikala, aide-soignant: « Je me considère comme un partenaire de soins »
« Avant la mise en place de 2-DIL, je courais partout, c’était compliqué de me focaliser sur mes soins. Depuis que je travaille en binôme avec un infirmier ou une infirmière, notre charge de travail à tous les deux s’est allégée. La répartition est plus équitable et je peux me consacrer pleinement à mes actes d’aide-soignant. C’est-à-dire les soins, mais aussi le dialogue. Car parler avec les patients fait partie des soins. Je suis vraiment là pour eux. Au niveau personnel, être plus qualifié (Féfé a suivi une formation de 150 heures lui permettant de réaliser cinq actes infirmiers) me permet de participer aux soins et me confère une vraie place de soignant au sein de l’équipe. C’est très valorisant. Je pense que les patients ressentent cette nouvelle dynamique. Ils se sentent mieux pris en charge. Dernièrement, une patiente nous a d’ailleurs remerciés en offrant des pralines à toute l’équipe ! »
Aline Dehalleux, infirmière : « Avec 2-DIL, les tâches sont mieux réparties »
« Au sein de l’unité, nous avons toujours travaillé en excellente collaboration avec nos collègues aides-soignants. Mais depuis 2-DIL, c’est encore mieux. Ils sont devenus des vrais partenaires de soins. Nous sommes complémentaires. Les tâches sont mieux réparties. Par exemple, le fait que les aides-soignants prennent les paramètres des patients - un acte de soins vital mais énergivore - avant notre premier tour de l’unité, nous donne un premier aperçu de l’état de ces derniers, ce qui nous permet d’anticiper les soins de la journée et évite les allers-retours inutiles. 2-DIL a vraiment redonné un nouveau souffle et une nouvelle dynamique à l’équipe. Chacun fait profiter l’autre de son expertise. C’est enrichissant et surtout très bénéfique pour nos patients. »
Camille Van Driessche, étudiante infirmière en BAC à la Haute Ecole Vinci (année 2022-2023)
Rien qu’en faisant la toilette d’un patient, on peut déjà se faire une idée de ce qu’il a. Et je trouve ça vraiment important. Je me sens beaucoup plus responsabilisée et je sens qu’on a confiance en moi. Grâce à cette confiance, je suis plus à l’aise. Il faut aussi oser demander, j’avais demandé pour faire mes soins, et j’ai fait beaucoup de soins en 2e année. Il faut être proactif et savoir demander tout en restant dans son statut d’étudiant.