Suspicion de faute scientifique : Saint-Luc fait le point
Suite aux articles parus ce lundi 16 juillet dans la presse concernant une présumée faute scientifique, l'UCL, associée aux Cliniques universitaires Saint-Luc, a tenu une conférence de presse pour une mise au point.
En janvier 2011, un bébé naissait aux Cliniques universitaires Saint-Luc suite à une greffe de
tissu ovarien entre soeurs non jumelles génétiquement différentes. Une première mondiale pour l'équipe du Pr Jacques Donnez, chef du Service de gynécologie et d'andrologie.
A l'âge de 15 ans, la patiente bénéficiait d'une chimiothérapie agressive (très toxique pour l'ovaire) et d'irradiation pour le traitement d'une maladie nécessitant une transplantation de moelle
de sa soeur HLA compatible. On sait que ce traitement induit une ménopause précoce chez près
de 100% des patientes bénéficiant de ce traitement après la puberté. Dès lors, la patiente n'a plus
été plus été réglée pendant plus de 15 ans et les taux d'hormones ont prouvé la ménopause.
Les marqueurs tant biologiques que physiques confirmaient donc cet état de ménopause.
La patiente désirant être enceinte et refusant, pour motifs culturels et religieux, le don d'ovocytes qui avait été proposé, nous avons accepté d'effectuer une greffe de tissu ovarien prélevé chez la soeur qui avait déjà donné la moelle 17 ans plus tôt.
Après avoir confirmé qu'il y avait bien compatibilité totale entre les deux soeurs, un fragment de l'ovaire de la soeur Ğ donneuse ğ fut transplanté à la receveuse.
Quatre mois plus tard, la récupération de l'activité ovarienne fut confirmée par la présence de règles et des taux d'oestrogènes (hormone féminine) élevés.
Cette patiente, qui n'avait jamais été réglée spontanément depuis 17 ans, l'était donc à nouveau
et quelques mois plus tard, en bénéficiant d'une tentative de fécondation in vitro, était enceinte et accouchait spontanément d'un bébé en bonne santé.
La preuve irréfutable qu'il s'agissait bien d'une réussite et d'une première mondiale était l'analyse génétique qui prouvait sans aucun doute que le bébé avait bien comme origine le greffon c'est-à-dire l'ovaire de la donneuse.
Le Pr Van Steirteghem, éditeur en chef de la revue scientifique Human Reproduction, a demandé
au Pr Donnez certains éclaircissements complémentaires concernant deux articles : Ğ Livebirth after allografting of ovarian cortex between genetically non-identical sisters ğ et Ğ Restoration of ovarian function after allografting of ovarian cortex between genetically non-identical sisters ğ.
En mai 2012, paraît la réponse du Pr Jacques Donnez aux questions du Pr Van Steirteghem.
Après avoir examiné les réponses du Pr Donnez et demandé l'avis d'experts internationaux, le Pr
Van Steirteghem a conclu que l'indication, les résultats et la discussion de ces articles étaient
scientifiquement prouvés et que leur publication était maintenue.
Comme ce dernier le signale dans l'éditorial de la revue scientifique Human Reproduction paru
avec la lettre du Pr J. Donnez, la présence, dans une autre biopsie, de follicules primordiaux (dont
le Pr Donnez a prouvé qu'ils étaient non fonctionnels en établissant leur mort cellulaire) ne changeait en rien ni l'indication et ni les résultats.
Aspects éthiques
Concernant les aspects éthiques de l'étude parue dans Human Reproduction (en 2011), il a été considéré par les auteurs que cette dernière se situait dans la continuité du programme de recherche approuvé dès 1995 par les autorités de l'UCL qui avait, à cette fin, mis sur pied un comité d'éthique ad-hoc interne (comme indiqué dans la lettre de J. Donnez au Pr Van Steirteghem, éditeur de Human Reproduction en 2012).
De bonne foi, les auteurs ont considéré qu'un accord spécifique du Comité d'Ethique pour cette étude ne devait pas être obtenu. En effet, depuis la fin des années 1980, il existait un dialogue permanent entre les autorités de l'UCL et le chef du Service de gynécologie pour ces matières touchant le domaine de la bioéthique.
Pour sa part, l'éditeur en chef de Human Reproduction a consulté et pris l'avis du Ğ Committee on Publication Ethics ğ concernant l'article publié en 2011.
Enquête interne à l'UCL
Suite à une plainte déposée en interne à propos d'une publication scientifique du Pr Jacques Donnez et comme le stipule son règlement, l'UCL a immédiatement procédé à l'instruction de cette plainte.
Un premier rapport d'enquête sous la responsabilité du Vice-Recteur à la politique du personnel a permis dans un premier temps de constater des divergences de vues entre le Pr Donnez et les autorités en charge de l'enquête. Suite à ce constat, de nouvelles analyses biologiques et génétiques ont été effectuées et ont permis de confirmer le caractère incontestable des résultats scientifiques. Suite à ces nouveaux éléments le rapport a été retiré par le Vice-recteur.
"Nous avons des règles internes précises qui permettent d'appréhender ce type de situation en
faisant appel à des experts tant internes qu'externes", souligne Bruno Delvaux, Recteur de l'UCL.
Ğ Au final, les résultats scientifiques du Pr Donnez et leur publication n'ont pas été remis en
cause ğ.