Régénération tissulaire : réparer les vivants
Régénération tissulaire : réparer les vivants
Régénérer in vitro un nez, une oreille, une paupière... pour reconstruire un visage mutilé ne relève plus de la science-fiction. Cette technique novatrice et pionnière développée par le Dr Jérôme Duisit, boursier de la Fondation Saint- Luc et bénéficiaire du Fonds Dr Gaëtan Lagneaux, permettra de contourner l'obstacle majeur du traitement immunosuppresseur et d'offrir un traitement à un grand nombre de patients défigurés. Une approche peu classique puisqu'il s'agit de ne pas modifier le patient receveur, mais bien de travailler uniquement sur le greffon.
En 2005, le Pr Benoît Lengelé, chef du Service de chirurgie
plastique, en collaboration avec ses confrères français,
contribuait à la réussite de la première greffe de visage.
Depuis, seule une trentaine de patients dans le monde ont
pu bénéficier d'une telle chirurgie. Pourquoi si peu de cas ?
Surtout lorsque l'on sait que, rien qu'en Belgique, quelques
patients auraient besoin d'une telle reconstruction complexe
du visage ?
Ğ La greffe de visage est la combinaison de deux techniques
chirurgicales : la transplantation d'organes et la
chirurgie plastique, explique le Dr Jérôme Duisit, Médecin
Assistant Clinicien Candidat Spécialiste en Chirurgie plastique
et chercheur au sein des Laboratoires de morphologie
expérimentale et de chirurgie expérimentale et de transplantation.
Une telle intervention nécessite la prise, à vie,
d'un lourd traitement immunosuppresseur afin d'éviter le
rejet du greffon. Ce traitement peut avoir des complications
médicales sévères. C'est la raison pour laquelle, cette intervention
n'est proposée qu'à des patients jeunes, en bonne
santé et souffrant d'une défiguration majeure, inaccessible
à la reconstruction par une autogreffe ğ.
Comment contourner cet obstacle ? Par un procédé très
innovant et jusqu'ici totalement original, associant chirurgie
et ingénierie tissulaire...
Neutraliser le greffon
Le principe est le suivant : il s'agit de prélever un greffon
(une oreille, un nez, des lèvres) sur un donneur cadavérique,
de le vider de ses cellules propres tout en conservant
son architecture biologique ainsi que ses vaisseaux
et ses nerfs. Cette matrice devenue inerte et donc non
sujette à rejet, est ensuite recolonisée avec des cellules
souches prélevées sur le patient receveur.
Le nouvel organe obtenu par ce procédé est tout à fait
compatible pour le patient receveur... Ce qui évite de lui
imposer un traitement immunosuppresseur au long cours
aux effets secondaires potentiellement délétères.
Ğ L'un des multiples avantages de cette technique est la facilité de se procurer un greffon, souligne le Dr Duisit. En effet, ce dernier n'est plus soumis aux exigences de la compatibilité, puisqu'il sera vidé de ses éléments vivants propres afin d'être recolonisé par le matériel cellulaire du receveur. ğ
Le bioréacteur : unique au monde !
La mise au point du processus de neutralisation (ou décellularisation)
du greffon est déjà très avancée. L'application
de cette technique à des transplants de la face d'origine
porcine et humaine est en cours. Un bioréacteur permettant
aux greffons de reprendre vie - encore au stade de prototype - a été conçu par le Dr Duisit en collaboration avec
l'Ecole polytechnique de Louvain et le Louvain Bionics
(Dr B. Herman, Pr B. Raucent).
De l'espoir pour les patients gravement défigurés
Les procédés permettant de réaliser ces différentes
phases ont fonctionné une première fois sur modèle porcin
(une oreille plus précisément) et sont cours de test sur
modèle humain cadavérique (l'oreille et la face).
Ce projet de recherche permettra, peut-être dans l'intervalle
d'une décennie, de proposer des reconstructions
chirurgicales performantes à de nombreux patients de
tous âges, mutilés par des brûlures, un cancer, un accident
et qui aujourd'hui ne peuvent bénéficier de reconstructions
performantes ou d'allogreffes.
Un visage sur-mesure ?
Les travaux du Dr Duisit ouvrent la voie à de nombreux
possibles. Notamment la mise au point d'une matrice
synthétique sur-mesure en 3D. L'identité morphologique
du patient serait alors respectée et il retrouverait son
propre visage à l'issue de la greffe.
Ces travaux sont ambitieux et leurs étapes préliminaires sont encourageantes. De nombreux obstacles restent toutefois à franchir pour qu'ils quittent l'univers de la science-fiction et deviennent des faits de science d'abord, et une réalité clinique ensuite. Avec de la persévérance, ce qui ressemble encore pour certains à une utopie, constitue dès à présent dans l'esprit des chercheurs, un espoir pour les patients défigurés.
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1910 3677 7110 BIC: CREGBEBB
Communication : Ğ Echos 30-Dr J. Duisit ğ
Plus d'infos
Dr Jérôme Duisit, jerome.duisit@uclouvain.be
reconstruire un visage mutilé ne relève plus de la science-fiction. Cette technique novatrice et pionnière développée
par le Dr Jérôme Duisit, boursier de la Fondation Saint-
Luc et bénéficiaire du Fonds Dr Gaëtan Lagneaux,
permettra de contourner l'obstacle majeur du traitement
immunosuppresseur et d'offrir un traitement à un grand
nombre de patients défigurés. Une approche peu classique
puisqu'il s'agit de ne pas modifier le patient receveur, mais
bien de travailler uniquement sur le greffon.