Nouvelle Première mondiale dans le domaine des malformations veineuses
Recherche UCL- Cliniques universitaires Saint-Luc
Première mondiale dans le domaine des angiomes : découverte d'un gène muté à l'origine de 20% des cas de malformation veineuse
Le Pr Miikka Vikkula, du laboratoire de génétique moléculaire humaine de l'Institut de Duve (UCL) et le Pr Laurence Boon, du Centre des malformations vasculaires des Cliniques universitaires Saint-Luc (UCL), ont réalisé avec leurs équipes une avancée d'importance mondiale dans le diagnostic et le traitement des malformations veineuses: la découverte d'un gène dont les mutations permettent d'expliquer 20% des cas de malformation veineuse. Cette étude, qui s'inscrit dans la continuité du travail de recherche effectué par les Prs Vikkula et Boon au cours de ces 20 dernières années, sera publiée ce jeudi 3 décembre dans la prestigieuse revue scientifique American Journal of Human Genetics.
La malformation veineuse est un type d'angiome qui touche environ une personne sur 2 000 (+/- 6000 personnes en Belgique). Cette maladie chronique, actuellement rarement guérissable, est une anomalie localisée des veines qui peut envahir n'importe quelle partie du corps. Souvent très étendue, elle s'accompagne de douleurs quotidiennes très invalidantes, de faiblesses musculaires, de saignements,... Autant de symptômes qui réduisent de manière significative la qualité de vie des patients, qui se voient incapables de mener une vie normale.
Identification du gène muté TEK : de la forme héréditaire à la forme non-héréditaire de la maladie
En 1996, le Pr Miikka VIKKULA et le Pr Laurence BOON, alors chercheurs post-doctorants à la Harvard Medical School, à Boston, ont découvert que le gène TEK était muté dans la forme familiale (ou héréditaire) des malformations veineuses1. Après de nombreuses années de recherche et l'établissement de leurs équipes à Bruxelles (au sein de l'Institut de Duve de l'UCL et des Cliniques universitaires Saint-Luc), ils ont découvert que plusieurs patients atteints d'une malformation veineuse non-héréditaire présentaient également une mutation dans le gène TEK. C'est le Pr Nisha LIMAYE, chercheuse qualifiée FNRS et membre de l'équipe du Pr M. VIKKULA, qui a étudié des tissus réséqués et démontré que ces mutations sont uniquement présentes dans les lésions, et sont donc tissulaires(2).Caractérisation des altérations induites par les mutations
Le gêne TEK code pour un récepteur qui s'appelle TIE2 et qui se trouve sur la surface cellulaire. Cela signifie qu'il transporte des signaux de l'extérieur de la cellule vers l'intérieur, et utilise pour cela différents facteurs intracellulaires qui agissent comme des petits soldats. Après la découverte des mutations TIE2/TEK comme une cause permettant d'expliquer environ 60% des cas de malformation veineuse, le laboratoire du Pr VIKKULA a mis en évidence que ces mutations rendent le récepteur TIE2 hyperactif. En temps normal, le récepteur devrait seulement laisser passer des signaux lorsque ceux-ci sont détectés à l'extérieur de la cellule. Suite aux mutations, TIE2 transmet ces signaux de manière ininterrompue, à l'image d'un feu de signalisation qui devrait en principe passer au rouge mais reste toujours vert. Cette hyper-activation de TIE2 résulte en une hyper-activation de plusieurs facteurs intracellulaires (les Ğ petit soldats ğ) au sein de cette voie de signalisation appelée PI3K-AKT-mTOR3. Le relais de signaux ainsi constitué résulte en une différenciation anormale, ce qui veut dire que les cellules ne savent plus communiquer et se positionner correctement entre elles. Par conséquent, leur prolifération et mobilité en sont altérées, et la structure des vaisseaux dont font partie ces cellules devient anormale.
Identification d'un nouveau gène muté chez les patients atteints d'une malformation veineuse
Avec une recherche systématique, l'équipe de Pr VIKKULA a détecté que 40% des patients ne présentaient pas de mutation dans le gène TEK. Les chercheurs ont alors émis l'hypothèse que l'un des gènes qui code pour les Ğ petits soldats ğ de la voie de signalisation en aval du récepteur TIE2, pourrait être muté. L'équipe du Pr VIKKULA a mis à profit la plateforme de génomique de l'UCL qui donne accès à la technique du séquençage massif en parallèle, pour augmenter la sensibilité de détection des mutations tissulaires. Cette technologie, ainsi que l'analyse bio-informatique développée en parallèle sur la plateforme, a permis aux scientifiques d'identifier des mutations dans le gène PIK3CA. Ce gène code pour une sous-unité de PI3K (un des petits soldats de la voie de signalisation). En collaboration avec l'équipe du Dr Lauri EKLUND, du Centre of Excellence in Cell-Extracellular Matrix Research de l'Université d'Oulu, en Finlande, les scientifiques ont ensuite démontré que ces mutations provoquent également une hyper-activation de la voie de signalisation PI3K-AKT-mTOR.(4)
Le traitement par Rapamycine, une thérapie efficace pour les deux types de patients ?
Ces résultats démontrent une similitude entre les malformations veineuses dues à une mutation tissulaire dans le gène TEK ou le gène PIK3CA : l'hyper-activation de la voie de signalisation PIK3-AKT-mTOR. Ceci renforce l'idée que cette voie est une cible importante pour le développement de nouvelles thérapies. Ainsi, la Rapamycine, molécule qui inhibe mTOR et dont l'efficacité chez un certain nombre de patients atteints de malformation veineuse a été démontrée cet été par les équipes des Professeurs VIKKULA et BOON (voir annexe), devrait être utilisable chez les deux groupes de patients (dont la mutation se situe sur le gêne TEK ou le gêne PIK3CA). Cette hypothèse est renforcée par le fait que trois des six patients traités lors de l'étude clinique publiée en aout 2015 dans le prestigieux Journal of Clinical Investigation, avec des résultats très prometteurs, s'avèrent être porteurs d'une mutation PIK3CA dans leur lésion.
Quelles conséquences a cette découverte ?
La découverte d'aujourd'hui permet surtout:
- de connaître la cause de la malformation veineuse chez 20% de patients supplémentaires, portant au total la connaissance de l'origine génétique d'environ 80% des angiomes de ce type;
- d'identifier la cible thérapeutique pour ces patients;
- d'utiliser la Rapamycine en essais thérapeutiques chez ces patients;
- de comparer les réponses des patients lors d'études cliniques réunissant les trois facteurs génétiques connus (TEK, PIK3CA, et non- TEK -PIK3CA);
- de renforcer l'implication de la voie de signalisation PI3K-AKT-mTOR en vue de favoriser le développement de traitements pour les malformations veineuses en général.
Avec quelques 2000 patients suivis annuellement, le Centre des malformations vasculaires des Cliniques universitaires Saint-Luc est devenu une référence majeure dans le secteur médical, tant au niveau national qu'international. Le Centre fêtera ses 25 ans l'an prochain. Pour mieux aider et informer les patients, ses équipes ont fondé une association de patients, VASCAPA (vascular anomaly patient association - www.vascapa.org). Grâce au travail de recherche effectué en étroite collaboration avec le laboratoire de génétique moléculaire humaine (Institut de Duve, UCL) depuis 1993, la perspective de développer de nouvelles thérapies pour les malformations vasculaires est plus que jamais d'actualité.
Le prix InBev - Baillet Latour, une reconnaissance prestigieuse pour ces recherches
Au printemps 2013, le Fonds InBev - Baillet Latour a décerné son Prix annuel de la Recherche Clinique aux Prs Laurence Boon et Miikka Vikkula. Ce prix de renom a récompensé leurs recherches dans le domaine des anomalies vasculaires (Ğ angiomes ğ) et des lymphoedèmes, débutées en 1993. Cette reconnaissance a renforcé leur volonté commune d'aboutir, au cours de leur recherche, à l'identification de nouvelles thérapies pour les anomalies vasculaires.
Le Pr Miikka Vikkula (Institut de Duve - UCL) et le Pr Laurence Boon (Centre des malformations vasculaires de Saint-Luc) ont réalisé avec leurs équipes une nouvelle avancée d´importance mondiale dans le diagnostic et le traitement des malformations veineuses: la découverte d´un gène dont les mutations permettent d´expliquer 20% des cas de malformation veineuse.